Fiche : Flenael

Un début d'histoire pour Flenael :

Saine obscurité, décompte de l’eau qui résonne sur la pierre, chaleur mêlée d’humidité, lourde et apaisante, la vie réside en tout. Je sais les choses, je ressens la matière, je devine parfois. Nous sommes ainsi pour la plupart, sensibles, certains lucides d’autres clairvoyants. On nous appelle les Elfes de la terre, les proscrits, les Elfes Gris, les Freys pour les Elfes d’Eldenir ; les “autres” ne nous connaissent pas. Et parmi mes congénères je suis sûrement le plus banni.

Un souffle d’air, élément d’évasion. Ils approchent. Dans un instant, la porte s’ouvrira. Pour annoncer… je sais déjà !

Presque un demi-siècle d’attente avant qu’ils se résignent à cette évidence. Ils doivent faire appel à moi, aux connaissances que me légua ma mère, ma génitrice plutôt. Un don, une malédiction. Celle qui affecte mon peuple, le peuple des Afnalëis, depuis la Bataille des Ages. De cette neutralité religieuse déclarée et farouchement défendue par les anciens face aux rumeurs de confrontation à venir. Et la double peine qui s’ensuivie infligée par les divinités. De notre forêt verdoyante il ne reste qu’une futaie pétrifiée ; de la grandeur d’un peuple que la rancœur désertique d’un passé éteint. Mais les traditions restent, lourdes, indignes d’un avenir que certains d’entre nous voudraient espérer.

La porte s’entrouvre, ce sont eux, les gardiens des traditions, les Afénis. Et leur question, je la connais, je l’ai toujours connue, car j’étais préparé. Cela fait deux siècles que je suis préparé pour cette scène.

Oui j’accepte de reprendre les recherches de la Grande Prêtresse, de ma mère – ma génitrice – parce qu’elle est allée trop loin… ou pas assez. Oui j’accepte de partir, car je n’ai plus ma place en cette communauté. Oui j’accepte car leur inertie et traditions séculaires me pèsent plus que le décompte d’un temps dont je ne suis plus.
Et j’accepte parce que l’Armithral se meurt désormais, dernier symbole vivant de notre grandeur passée, dernier rempart entre nous et notre immortalité ; que nous avons crue être comme nous éternelle ! L’arbre cœur de notre cité se meurt à son tour, et mes compatriotes avec, et cela par la faute, par l’espoir de ma mère – ma génitrice – de défaire cette terrible sanction.

Je sors de ma cellule pour recouvrer un semblant de liberté. Mais je suis, et je reste un exilé. Et le nom de mes ancêtres est sanctionné, chuchoté, tronqué. Le seul salut sera le sacrifice.

On me conduit vers la sortie de l’Arbre des “larmes de pierre”… vers la liberté ? Les chaines ne sont pas toujours où on les ressent. Instinctivement, je rabats mon bandeau pour éviter l’agression de l’astre du jour sur mes yeux clairs. Insupportable clarté que nous avons perdue il y a si longtemps. Peu de mots sont échangés avec les Afénis ; est-ce nécessaire ? Je sais ce qu’ils attendent de moi ; ils savent ce qui m’attend en cas d’échec !

Je me dirige vers la sortie de notre communauté, entre les vestiges des anciennes majestés sylvestres désormais pétrifiées. Nulle ombre dans les vastes espaces désertiques et asséchés, notre monde est d’obscurité, notre passé souffrance, notre avenir… hum !

Je marche plusieurs jours vers la capitale d’Eldenir, ne sachant par où commencer. Arrivé sur place, le désintérêt pour un Afnalö est évident : la plupart des autres elfes ne nous connaissent plus, ou pire nous déconsidèrent. Après quelques nuits passées entre les sentiers feuillues du domaine (la présence des arbres crée un bien-être que je n’aurais pu imaginer !), je perçois une affiche plantée sur une branche. Elle décrit une cité, la qualité de son organisation cosmopolite, et les possibilités offertes dans les terres alentours qui justifient de diriger ma quête vers cette terre pleine de promesses et de dangers. Le message est signé d’une certaine Akhyla. Je m’aventurerai à lui parler si ma destinée venaient à croiser la sienne et je décide de me diriger vers la ville de Juno…